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PROFILS AILE D'OISEAU POUR PARAPENTES MONOSURFACE
À
la recherche d'un nouveau profil monosurface - Conception de la
géometrie de triangle optimale - Monosurfaces à haute performance
Stork/BHL6
1. Motivation
A la recherche du meilleur profil pour sa nouvelle aile haute performance "Stork" (Cigogne), Arnaud Martínez
fait l'analyse de certains profils type "aile d'oiseau" et type
monosurface BHL*, propose un nouveau profil cigogne adapté aux ailes
monosurface, et fait la conception de la géométrie de triangle optimale. Les notes d'Arnaud en lettre italique. Quelques notes et dessins aussi ajoutés par Pere Casellas, en pensant à l'application en BHL6. L'article recueille des extraits d'e-mails échangés sur cette question.
2. Analyse des profils aile d'oiseau
J'ai
fait quelques recherches que je souhaite partager concernant les
profils single skin. J'ai étudié différentes recherches scientifiques
universitaires de profils d'ailes d'oiseau, et j'y ai trouvé un
candidat aux propriétés intéressantes. La cigogne ! Un chercheur
a fait une comparaison aérodynamique (CFD) de plusieurs profils
oiseaux, et le profil de la cigogne (stork en anglais) m'a semblé
intéressant car:
L'épaisseur globale, le bord
d'attaque extrados, et la position de cambrure maxi me rappelle Bhl2,
qui comme nous le savons, fonctionne.
Mais surtout, les propriétés aérodynamiques du profil sont très intéressantes:
La finesse maxi est constante entre 4 et 8 degrés d'incidence ! Une
voile calée à 6 degrés pourra alors être accélérée sans perdre
d'altitude. Aussi, elle pourra être ralentie sans perdre de distance.
Elle perdra peu de performances à cause de mouvements de pitch, et
finalement, elle sera plus facile à ajuster car une erreur d'incidence
de +/-2° n'aura pas d'impact négatif sur la finesse.
Une autre propriété intéressante est
l'incidence de portance maxi (de taux de chute minimal) à 12°, loin de
la finesse max, mais aussi loin du décrochage, ce qui suggère un profil
avec une enveloppe d'incidence vaste (contrairement aux voiles de
compétition qui supportent mal les incidences fortes et décrochent tôt.)
J'ai donc comparé cette cigogne à la Bhl2, mais aussi à la Bhl3 pour laquelle tu as un peu de feeling.
Enfin, j'ai fait une esquisse d'un
profil similaire à cette cigogne, en considérant aussi Bhl2, et
quelques contraintes propre au parapente monosurface.
Ma seule réserve sur ce profil se
trouve au niveau du nombre de reynolds, qui est plus petit pour la
cigogne que pour nos parapentes, mais mon intuition me dit que notre
reynolds bien supérieur risque de gommer les effets de traînée et
donnera globalement de meilleures performances à basse vitesse.
J'ai fait 3 planches pour illustrer mes idées, les voici en pièce jointe.
Figure 1: Analyse profils de l'aile de l'oiseau
3. Comparison Stork - BHL2 - BHL3
Figure 2: Comparison Stork - BHL2 - BHL3
C'est très agréable de savoir que le profil BHL2 est un peu similaire à celui de la cigogne! :)
Rappelez-vous que le profil BHL2, qui a donné de bons résultats, est
également le même que BHL1, BHL4, et BHL5 (seules les différences dans
la forme des triangles, et le % épaisseur en BHL5).
Le profil BHL3 est décrit ici. L'aile avec profil BHL3 faite par Adrenaline Paragliders ici.
4. Proposition de profil stork monosurface
Figure 3: Proposition de profil stork monosurface
Figure 4: Comparaison plus précise Stork - BHL2 - Stork
Note 2021-05-18: Voici la
superposition plus précise des profils cigogne et bhl2, c'est vraiment
quasi identique. Je ne vois maintenant aucun intérêt à toucher à
l'extrados bhl2. Donc la recherche va se situer au niveau de l'angle
epsilon, avec comme objectif imiter la cigogne au mieux que possible
(angle assez aggressif).
Fait intéressant, la conclusion que le profil idéal "cigogne"...
(au moins sur le côté extrados) est exactement le BHL classique
(1,2,4,5) !!!
5. Étude de solutions pour la transmission des forces
Le profil, vert "cigogne", semble avoir le point d'épaisseur maximale un peu plus en arrière que BHL2. Et avec un angle "epsilon"
important, ce qui est logique et probablement très favorable aux effets
de traînée aérodynamique. La doute est que lorsque la partie avant du
profil est de faible épaisseur, transmet les charges du point d'ancrage
très directement à l'extrados, et donc d'un point de vue mécanique,
elle n'est pas aussi efficace.
Une solution possible pour améliorer la répartition des charges, serait
d'ajouter des triangles externes dans la zone A. Cela fonctionnerait
bien dans les parapentes simples de type BHL2 (figures a et b). Dans le
cas des parapentes utilisant des diagonales internes dans la zone A
(Stork/BHL6), il est recommandé que les diagonales soient à un angle
aussi vertical que possible (figure c). Il faudrait donc étudier s'il
est possible d'ajouter des triangles ou des lignes externes, sans trop
augmenter la résistance parasite.
Figure 5: Étude de solutions pour la transmission des forces à travers la faible épaisseur dans le nez du profil
En effet, le profil relativement fin en bord d'attaque pose certains désavantages mécaniques pour un parapente.
Pour y remédier j'ai également pensé
à une ramification de suspentes supplémentaire très proche de la voile
(~20cm) pour diviser les A en A1 et A2, comme sur ton dessin.
Si ma mémoire est bonne niviuk fait ça sur le skin, aussi je crois sur le kite monosurface "peak2" de chez Flysurfer (Skywalk).
Le jonc en plastique va bien
rigidifier la forme avec un pli du nez si prononcé. Je pense à un jonc
un peu en forme de cœur <3, pour faire effet de compression aussi.
Et puis avec 2 points d'attache le
bord d'attaque va être bien rigide en pitch, il ne va pas pivoter
autour du point d'attache A et "casser" le profil.
Je n'aime pas ajouter des suspentes
d'habitude mais je pense que dans ce cas ça reste la meilleure
stratégie. Les triangles aussi devraient fonctionner mais ça risque
fort de diminuer la performance, les turbulences au bord d'attaque sont
un gros facteur de l'efficacité du profil. En single skin nous avons
l'avantage d'un bord d'attaque pur, profitons en !
J'ai l'intention de revoir un peu le
profil vert (c'est juste un dessin rapide pour l'instant), revoir un
peu la voûte, et de voir ce que ça donne sur LEP.
Et tu l'aura certainement deviné, le nom de la
voile: Stork!
6. Conception de la géométrie de triangle optimale
Ces réflexions et études sont réalisées dans le but d'obtenir
une surface la plus lisse possible, avec des variations de courbure
constante. L'analyse de quelques photographies de surfaces de parapente
monosurface, prises avec une lumière tangente, montre que ce n'est pas
une tâche facile.
Dans la continuité du sujet des déformations et des triangles
optimisés, voici le raisonnement poussé encore plus loin. Avec 3
morceaux de tissu (et plus de travail), on peut arriver à une structure
allégée, et dimensionnellement stable sur 6 axes, en tissu léger. Il
est possible de faire encore plus d'axes mais c'est à la limite de la
practicalité, et les améliorations ne justifient plus la complexité
ajoutée (sauf peut être si on veut faire un 2-liner :D).
Il n'est alors plus nécessaire de découper des nervures, mais plutôt
des pièces en forme de L, dans le sens du tissu, ce qui est très bien
pour la consommation de matériau. L'utilisation du tissu léger type
skytex27 n'aura aucun problème ici. Il est alors possible d'utiliser un
seul rouleau de tissu pour toute la voile, et il n'est plus nécessaire
de faire des bandes de renfort ou des ourlets.
Le travail d'assemblage, sera par contre plus complexe, avec beaucoup
plus de pièces. L'idéal absolu serait un ripstop tissé de façon
concentrique, mais à ma connaissance, cela n'existe pas :)
Figure 7. Étude des triangles optimisés pour un trois lignes
Conception de la géométrie de triangle optimale:
J'ai réfléchi aux déformations des voiles single skin, en particulier la déformation à l'endroit où 2 triangles se rencontrent.
Cette déformation apparaît car les triangles ne sont pas équilibrés,
c'est à dire que le profil tire plus fort d'un côté que l'autre. Je
me suis dit: on cale le pilote par rapport au Centre de pression
global du profil. Si on cale la pointe du triangle par rapport au
centre de pression local, le triangle ne voudra pas tourner, et on
évite la déformation du profil !
Voici une planche ou j'explore l'idée.
J'ai pris uniquement la partie négative (lift) de la distribution de
pression à finesse max, car c'est l'extrados que je veux caler. J'ai calculé le centre de pression local pour mes 3 triangles, et comme tu peux le voir, j'ai corrigé la pointe de B et C.
Mais je pense que ce n'est pas tout... La suspentes n'est pas verticale
comme le poids du pilote, donc il y a probablement encore un calcul à
ajouter pour corriger... Aussi
la section A ne tire pas juste verticalement, mais aussi vers l'avant,
donc ça fausse sûrement le calcul. Les sections B et C sont presque des
droites donc ça va.
Figure 8. Conception de la géométrie de triangle optimale (1).
J'ai ajouté les suspentes avec leur
angle au milieu du parapente (rib 1). Aussi j'ai inclus le nez dans le
calcul du CP pour les A, car il m'est apparu que le nez n'est pas
soutenu par le saint esprit mais bien par la suspension A... Sûrement
ça donne quelque chose comme en pièce jointe... L'effet du calage local
devrait en principe donner la possibilité de réduire la superposition
des triangles, car les déformations à cet endroit devraient être
beaucoup moins prononcées.
Figure 9. Conception de la géométrie de triangle optimale (2).
Concernant cette dernière réflexion sur l'orientation des triangles, je
pense que c'est très important. J'y ai aussi souvent pensé lors de la
conception des formes des différents profiles BHL.
Vous soulevez deux choses (si je comprends bien):
1- Centre de pression locale de la zone affectée par le triangle (en
tenant compte de la répartition des pressions autour du profil en vol
équilibré)
2- Orientation des lignes par rapport aux triangles
Et une troisième dont nous avons parlé il y a quelques jours:
3- Orientation de la grille du ripstop selon les directions des tractions maximales.
Je suis d'accord que l'étude de ces trois choses et la conception d'une
bonne solution pratique peuvent impliquer une augmentation
significative de la solidité et de l'uniformité du profil en vol, et
par conséquent de la stabilité et des performances globales.
En ce qui concerne le centre de pression local de chaque triangle, je
pense que c'est particulièrement important lorsque les triangles sont
larges. (3 ou 4 triangles par profil). Et j'ajoute qu'il faut aussi
prendre en compte les pressions relatives entre les triangles dans une
bonne conception du suspentage. Le tout dans le but, qu'il n'y aura pas
de rotations dans le propre plan du triangle (pour éviter les
déformations à la surface extrados).
Dans le programme LEparagliding, le suspentage est calculée selon
plusieurs options. Selon l'option "0" l'orientation d'une ligne dans
l'espace, a comme point final, le centre de gravité des points
d'ancrage finales, tous considérés avec le même poids relatif. C'est
une conception simple et fonctionne bien. Selon l'option "1" (pas
entièrement implémentée, et je dois réviser), le point final d'une
ligne dans l'espace est le centre de gravité pondéré par les poids
relatifs des forces aux points d'attache (pressions locales attribuées
à chaque triangle). Les pressions relatives à chaque point d'ancrage
sont estimées en % selon la table de la section 18.
Ma pensée actuelle est que la suspentage doit être conçue (surtout en
monosurface) en tenant compte de ces poids relatifs. Et que la forme
finale des triangles soit revue en une ou deux itérations: une fois la
suspension est calculée, il faut analyser chaque plan principal et
créer des profils avec des triangles spéciaux adaptés pour chaque
nervure, si nécessaire.
Et enfin, nous voyons que la proposition d'utiliser des triangles avec
des arêtes droites du BHL*, est parfaitement logique (bien que le
sommet supérieur puisse être arrondi si nécessaire). Deux "triangles"
contigus avec leurs arêtes paraboliques transmettront mal les charges à
la surface, car les pressions sur le profil ne sont pas constantes et
varient d'un triangle à l'autre. Je vais essayer d'ajouter quelques
schémas, pour illustrer tout cela et je vais poster ces notes (juste
intéressant pour les "geeks" de conception de parapente!).
Oui tout à fait, les point soulevés sont en effet :
1) CP local dans le plan du triangle
pour améliorer la cohérence du profil. Tu parles des pressions
relatives entre les triangles... Bonne idée... Je vais réfléchir.
2) Orientation de la suspente par
rapport au triangle, oui. Par contre je pensais juste à l'orientation
de la suspente dans le plan du triangle, mais tu soulève un point
important auquel je n'ai pas encore réfléchi: l'angle entre la suspente
et le triangle dans le plan de la voûte. Pour cela ta méthode (pas
encore implémentée si j'ai bien compris) à beaucoup de sens, cette fois
pas pour stabiliser le profil mais surtout pour stabiliser la voûte.
3) L'orientation du ripstop. Ce point est incontestablement efficace et je pense doit être implémenté partout où c'est possible. Les marques reconnues ne le font pas, et je pense que c'est à cause des coûts associés au travail supplémentaire d'assemblage.
PS: 100% d'accord avec toi concernant les triangles, les bords droits (orientés ripstop) sont la méthode la plus rigide.
Les paraboles sont intéressantes si
on oriente le ripstop verticalement par simplicité, mais uniquement si
un câble est en tension le long de la parabole. (je te montrerai sur
mon Evo orange, ça a l'air de fonctionner pas trop mal :))
7. Une confirmation venant de l'étude de structures des ponts
Simplement une confirmation venant de
l'étude de structures des ponts. La version de triangles avec
orientation variable du ripstop est similaire au pont "Cable stayed" et
est supérieure en terme de rigidité du profil et de résistance à la
déformation due à une charge non uniforme.
La solution ripstop vertical et câble
caténaire (parabole) est similaire au "suspension bridge" et est
efficace pour les distances longues mais est plus vulnérable aux
déformations si la charge est non uniforme (c'est notre cas), donc ce
n'est pas optimal pour nos triangles.
Figure 10. Différences entre les ponts suspendus "suspension briges" et les ponts haubanés "cable-stayed".
Figure 11. Déformations dans les ponts suspendus soumis à des charges non uniformes.
Je suis totalement d'accord avec l'analogie du pont suspendu/à haubans!
:) En 2012 j'ai publié ce petit dessin dans paraglidingforum. Les bords
paraboliques ne conviennent que si la charge par unité de longueur est
constante (le cas des ponts suspendus). Étant donné que les charges
peuvent varier le long du profil, et en fonction de la configuration de
vol, il est préférable de prévoir des zones de traction droites
(triangles avec bandes bien orientées )
Figure 12. On peut faire une analogie entre les formes paraboliques des
triangles de suspension du profil, et les paraboles formées par les
câbles des ponts suspendus (en inversant la direction des charges).
Cette forme géométrique parabolique serait optimale si la pression le
long du profil était constante (ce qui n'est pas le cas). Pour cette
raison, tous les parapentes BHL "série", ont des triangles avec des
bords droits, pour permettre la transmission correcte d'une enveloppe
de forces variables. D'autres raisons, évoquées ci-dessus, comme la
recommandation d'orienter la grille dans le sens de la traction,
renforcent cette option.
Cela confirme la démarche à suivre pour Stork et les autres voiles haute performance (ripstop orienté). Par
contre pour les voiles à construction simplifiée (nervure en 1 pièce de
ripstop vertical) il y a peut être des astuces pour limiter la
déformation. Les bandes aux bords des triangles sont évidemment une
bonne idée.
Sur ma BHL2 evo je suis en train d'essayer une autre méthode plus légère et moins coûteuse. J'ai
d'abord fait une couture le long de la parabole, pour avoir l'effet
caténaire de pont suspendu. Cependant, sur un pont suspendu, le
caténaire est libre de bouger, tandis que la couture est figée sur la
matrice du ripstop, ce qui donne déjà un avantage de rigidité. Mais
toujours pas optimal. Ensuite
j'ai ajouté des coutures droites, placées là où le ripstop est de
travers, pour relier la pointe du triangle à la couture de l'extrados.
4 coutures par triangle. Le
fil de couture est en polyester, qui résiste mieux à l'allongement que
le nylon, et le diamètre que nous utilisons est d'une force
surprenante, et une couture comprend 2 fils.
Le résultat semble être très rigide, en tout cas beaucoup plus que le
ripstop sans rien du tout. J'ai l'impression que en plus d'offrir un
chemin direct à la force, il distribue aussi mieux la charge sur
l'ensemble du triangle (grâce au ripstop vertical). Le poids ajouté par ces coutures est entre 15 et 20 grammes pour toute la voile!
Figure 13. Fils de renfort paraboliques et droits, sur le prototype BHL2-evo.
Une idée pour une amélioration de triangle simplifiée, pour les voiles où il est préférable de garder une construction simple.Une
sorte de compromis technique entre les recherches Stork et la
construction actuelle bhl, avec très peu de complexité additionnelle. J'ai pensé à une variante simple, et une variante "light".
La découpe des triangles à 90 degrés
devrait réduire la consommation de tissu, si on compare avec des
nervures en 1 pièce. Aussi les bandes de renfort sur le côtés du
triangle ne sont plus nécessaires. Basé sur une construction de pont à haubans en configuration "harpe" :) Je
pense qu'une solution comme ça a un potentiel intéressant pour les
voiles BHL. Il faudrait simplement revoir les 4 ou 5 triangles du
profil pour les faire à 90 degrés.
Figure 14. Amélioration de triangle simplifiée
Interprétation:
La bande centrale plus rigide, permet à tous les fils de la trame de
fonctionner correctement en traction, avec une répartition à 90 °. Ce
type de système d'optimisation de la direction du maillage du ripstop,
oblige à couper les triangles de forme indépendante, ce qui implique
plus de travail de coupe et d'assemblage. On voit qu'il existe
plusieurs systèmes, il faudra évaluer lequel est le plus approprié dans
chaque conception.
Un peu plus de travail de coupe et
d'assemblage, mais à priori une meilleure utilisation du matériau (qui
peut être un gramage plus léger) et moins de papier si on superpose les
triangles. Le méthode de pont harpe est un compromis efficace en terme de travail/rigidité /matériau / poids.
8. Études sur les prototypes précédents
Les
études sur les prototypes monosurface précédents (BHL 1,2,3,5), dont
nous connaissons les paramètres initiaux, nous permettent de détecter
les concepts à améliorer. L'analyse des rides qui se forment sur la
voile nous donne beaucoup d'informations...
Nous avons vu une ride en D dans l'aile BHL5 d'Eric BHL5 sans tension
(vidéo du jour 30). Effet qu'il a forcé en tirant sur l'élévateurs D
pour mieux mettre en évidence, et comprendre la cause. À l'aile BHL5 de
Thierry nous pouvons voir aussi (sans tension en bord de fuite) des
rides en D et E... Dans cette zone le profil est très droit (peu de
courbure) et sans tension de freinage il est difficile d'avoir des
tensions au tissu. Un jonc généreux devrait être la solution. Et aussi
en triangle "D" de BHL2. Un jonc en nylon peut aider beaucoup, mais
nous devrions mieux comprendre comment les éviter. Dans le cas du BHL5
avec réglage à 42% (forcé par les élévateurs, cela déforme toujours un
peu le profil, notamment dans la zone D-E qui ont une branche en V.
Figure 15. Interprétation des rides formées sur le triangles le plus proches du bord de fuite.
Au sujet des rides, l'endroit où elle se forment est très clair et la raison est aussi flagrante. Un triangle même s'il n'est pas orienté dans la trame agit comme le pont à haubans. Le tablier du pont subit une contrainte de compression. Malheureusement notre médium (ripstop) n'a aucune résistance à la compression. Le bord de fuite se rétracte pour cette raison.
Lorsque iI se rétracte, il perd la
portance qu'il est supposé générer en vol stabilisé. Ceci cause que le
triangle n'est porteur que du côté gauche de la suspension (il est
déséquilibré). Il subit alors une rotation correspondante, et ça forme
le pli.
Sur BHL5, les 2 derniers triangles
sont tenus par une suspension en V. Lorsque le frein est un peu tiré,
le bord de fuite est tendu, mais la force sur le bord de fuite est plus
élevée sur E que sur D ! Cela provoque une rotation de la suspension V
et ça tire D vers le bas, et ça fait un pli.
Le problème c'est la compression du
bord de fuite. Et sur BHL5 le facteur aggravant je pense c'est la
suspension en V, trop sensible aux rotations par distribution des
charges D et E, qui varie dès qu'on utilise les freins. Cela fait
migrer le problème jusqu'à C.
La suspension V est pratique pour
épargner de la longueur, mais c'est aussi un système instable, cela
pivote facilement en fonction des charges sur le profil. Tu te souviens
je t'avais envoyé une planche ou j'avais une option 2 liner pour Stork.
J'ai abandonné l'idée à cause de ce phénomène, la flexibilité trop
importante de ramifications en V trop proches de la voile. La solution
la plus rigide (la plus contrainte) sera la meilleure.
Pour
la solution miracle, il faut trouver un moyen de rendre le ripstop
résistant à la compression entre la dernière suspension et le bord de
fuite. Un jonc est une solution peu élégante mais probablement efficace.
Peut être une bande de plastique
plate... Plus flexible dans l'axe X mais rigide dans l'axe Z et
incompressible sur Y (grâce à la tension du span) ... C'est déjà mieux
pour le pliage de la voile... Peut être une bande en PET coupée dans
une bouteille en plastique, et cousue à cet endroit... Pas mauvais, Il
faut réfléchir... En théorie c'est une meilleure utilisation du
plastique q'un jonc de section circulaire.
L'analogie du pont à haubans encore une fois très précise. Ceci
explique pourquoi le grand pli au-dessus du triangle, bien qu'il puisse
être légèrement déplacé selon les tractions latérales droite et gauche.
Dans le cas BHL5, je suppose que tu fais référence aux triangles D et
E, qui sont ceux qui ont des plis et sont reliés par une pyramide de
suspensions. J'ai aussi remarqué que la pyramide décale le triangle E
vers le D (un léger chevauchement
dans cette zone. Une pyramide plus longue serait mieux du point de vue
des forces et pire du point de vue de l'aérodynamique). C'est pourquoi
je ne suis pas très convaincu que l'expérience des 5 triangles soit
totalement satisfaisante. Dans tous les cas, les expériences réelles
ainsi que la théorie nous permettent d'améliorer les conceptions. Des
renforts avec des bandes de mylar à la base des triangles peuvent être
une alternative aux joncs. Mylar et/ou joncs je pense seront
nécessaires. Dans la Stork, les forces de compression dans le dernier
triangle peuvent être plus fortes, car les côtés des triangles ont
moins d'inclinaison. Mais le nombre élevé de nervures répartit la
charge absolue.
L'angle entre la dernière suspension
et le bord de fuite sur Stork est quasi identique à BHL2, c'est fait
exprès. J'ai voulu limiter les risques en gardant une géométrie que
l'on connaît déjà bien.
L'objectif que je me donne c'est de garder une géométrie de voile
tendue et propre avant d'installer la cascade de freins :) c'est
ambitieux, mais c'est une base exceptionnelle pour le design du speed
system et du pilotage aux élévateurs. Une base comme ça nous mettra à
égalité aérodynamique avec les parapentes double surface à basse
vitesse.
Les nouvelles idées de Stork ouvrent la voie...!
9.
Notes historiques
Le père du vol libre, Otto Lilienthal, a également étudié le profil cigogne. Voir l'excellente analyse de ce dessin.
Figure 16. Étude cigogne, par Otto Lilienthal
D'après la littérature sur les
oiseaux il s'agirait du "profil le plus efficace pour une opération à
haute incidence", et comparativement aux autres aéronefs, le parapente
opère à une incidence de profil plutôt élevée, donc nous devrions nous
y retrouver.
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